Madame Hayat de Ahmet Altan

Plaisir de lecture : 18/20

j’ai aimé :

  • Le style très sensuel
  • La place accordée aux repas dans le roman

Madame Hayat de Ahmet Altan
Traduit par Julien Lapeyre de Cabanes
Parution le 1er septembre aux Editions Actes Sud
272 pages

Présentation de l’éditeur : Fazil, le jeune narrateur de ce livre, part faire des études de lettres loin de chez lui. Devenu boursier après le décès de son père, il loue une chambre dans une modeste pension, un lieu fané où se côtoient des êtres inoubliables à la gravité poétique, qui tentent de passer entre les mailles du filet d’une ville habitée de présences menaçantes.
Au quotidien, Fazil gagne sa vie en tant que figurant dans une émission de télévision, et c’est en ces lieux de fictions qu’il remarque une femme voluptueuse, vif-argent, qui pourrait être sa mère. Parenthèse exaltante, Fazil tombe éperdument amoureux de cette Madame Hayat qui l’entraîne comme au-delà de lui-même. Quelques jours plus tard, il fait la connaissance de la jeune Sila. Double bonheur, double initiation, double regard sur la magie d’une vie.
L’analyse tout en finesse du sentiment amoureux trouve en ce livre de singuliers échos. Le personnage de Madame Hayat, solaire, et celui de Fazil, plus littéraire, plus engagé, convoquent les subtiles métaphores d’une aspiration à la liberté absolue dans un pays qui se referme autour d’eux sans jamais les atteindre.
Pour celui qui se souvient que ce livre a été écrit en prison, l’émotion est profonde.

Mon avis :

Après la faillite puis la mort de son père, le narrateur, Fazil poursuit ses études de lettres sous l’insistance de sa mère mais doit revoir son niveau de vie à la baisse. Il déménage dans un foyer où il croise travestis, prostitués, bodyguard, rédacteur d’une revue dissidente, africain qui vend de la contrefaçon. Il doit aussi trouver un travail. Il fait de la figuration pour une émission de télévision.

C’est là qu’il rencontre deux femmes. Madame Hayat, plus âgée que lui mais pour qui il a une fascination. Il a une liaison avec cette femme désinvolte qui n’aime pas lire mais qui passe son temps libre à regarder des documentaires. Sur ce lieu de travail un peu kitch, il rencontre également Sila avec qui il a beaucoup plus de points communs. Étudiante en littérature qui avait une très bonne situation et qui se trouve également ruinée suite à une dénonciation. 

Notre narrateur qui était plutôt solitaire et renfermé, au contact de ces deux femmes, va s’ouvrir au monde qui l’entoure et aux personnes avec lesquelles il cohabite dans le foyer.

Derrière le récit de Fazil se dessine la situation inquiétante d’un pays où les dénonciations vont bon train donnant lieu à des arrestations arbitraires. Un pays où le motif d’incarcération se trouve après. Des barbus sillonnent les rues pour infliger des punitions à coup de bâtons aux infidèles. Le temps et le lieu ne sont pas précisés mais on peut deviner une grande ville turque se dessiner. 

On accompagne également Fazil lors de ses cours de littérature de deux enseignants très intéressants. 

Les femmes de ce roman ont une place importante, elles façonnent Fazil, l’ouvre au monde au monde. Elles sont audacieuses et transmettent leur courage à ce jeune homme.

L’écriture est poétique, voluptueuse, tous les sens sont mis en éveil. Les repas prennent une place très importante, que ce soit dans la cuisine du foyer où ils permettent les échanges et les confidences ou sous forme de rituel pour les amants rythmant le plaisir charnel. 

C’était une très belle lecture. C’est profondément humain. Les personnages créés sont bouleversants grâce à  leur histoire et à leurs espoirs.


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